Le Preneur

Choisir le bon contrat

Evaluer correctement le bon contrat à prendre est l'une des choses les plus difficiles à faire pour le preneur. Un bon contrat peut-être défini comme:
- si il est chuté, cela devait être une petite. Si on chute une garde c'est qu'on avait mal demandé et qu'on avait un jeu de petite.
- si le chien était blanc (sans honneur, ni atout) et que le contrat est fait cela devait être une garde. Si c'était une petite, c'était mal demandé.
- si le contrat est fait, une petite doit-être faite de moins de 10. Si la petite est faite de plus de 10 c'est qu'on aurait du demander une garde.
- si il est fait de plus de 30 et que c'était une garde c'est qu'on aurait du demander sans ou contre le chien.

Choisir le bon contrat est donc extrêmement important et fait la différence en fin de partie. Une garde faite de 20 rapporte 270 points alors qu'une garde sans chien faite de 1 en rapporte 312. Un bon preneur ne doit chuter que des petites.

  • Le preneur demandera une petite si il attend quelque chose au chien. Cela peut-être des atouts ou des honneurs. Cela ne peut pas être des bouts. On ne prend pas au tarot en espérant un bout au chien. Si le chien ne contient pas ce qui est attendu alors la petite sera chutée.
  • Le preneur prendra une garde si il n'attend rien du chien si ce n'est la possibilité d'écarter. Si le chien est blanc et que le preneur chute alors c'est qu'il aurait du demander une petite.
  • Le preneur prendra une garde sans chien si il lui manque moins de 5 points pour faire et si sa répartition ne nécessite pas d'écarter. Il prendra aussi une garde sans chien si il espére prendre le petit. Dans ce dernier cas, quelque soit le jeu du preneur, si il espére prendre le petit pour faire, il ne peut pas prendre garde contre le chien car celui-ci pourrait être au chien.
  • Le preneur prendra garde contre le chien si le contrat est fait dans sa main et sa répartition ne nécessite pas d'écarter.

    Le contrat à prendre dépend donc de l'évaluation correcte de son jeu. C'est le chapitre suivant.

    Evaluer Correctement son jeu

    L'évaluation du jeu du preneur se fait en plusieurs passes.
  • Première passe: compter son jeu: compter son nombre d'atouts et de points réels. Pour les points, compter 5 points par bout, 5 points pour 1 roi, 4 pour 1 dame, 3 pour 1 cavalier, 2 pour 1 valet.
  • Deuxième passe: évaluer sa longue: si il y a un couple roi/dame dans la longue (au moins 4ème) ajouter 1 atout. si le preneur n'a pas le roi dans sa longue enlever 1 atout. Si il n'y a pas de longue d'au moins 5 cartes, enlever 1 atout.
  • Troisième passe: évaluer ses atouts: Si le preneur possède 3 gros atouts strictement au dessus du 15 ajouter 1 atouts. Si le preneur ne dispose que d'un atout strictement au dessus du 15 enlever 1 atout.
  • Troisième passe: évaluer ses couleurs: Si le preneur a une chicane ajouter 5 points. Si le preneur a moins de 4 cartes à 2 couleurs ajouter 7 points.
  • Quatrième passe: évaluer sa position: si le preneur a l'entame ajouter 1 atout. Si le preneur était le donneur ajouter 1 atout et 3 points.
  • Cinquième passe: recompter son jeu. En fonction du nouveau nombre d'atouts théorique calculé ci-dessus passer si ce nombre est strictement inférieur à 6. Si ce nombre est 8 ajouter 3 points au nombre de points réels, si c'est 9 ajouter 6 points, si c'est 10 ajouter 9 points, si c'est 11 ou 12 ajouter 12 points.

    En fonction du nombre de points théoriques ainsi calculés, il faut évaluer la différence manquant pour faire le contrat (avec 3 bouts il faut faire 36 points, avec 2 bouts 41 points, avec 1 bout 51 points et sans bout 56).

  • si cette différence est supérieure à 18: passe.
  • si cette différence est comprise entre 9 et 18: petite.
  • si cette différence est comprise entre 4 et 8: garde.
  • si cette différence est comprise inférieure à 4: alors il faut ré-évaluer son jeu et faire une évaluation réelle plus précise et prendre carte par carte celles qui vont être faites ou non. Lors de cette ré-évaluation il faut considérer le cas ou il n'y aurait pas d'écart. Dans cette ré-évaluation le 21 et le petit comptent pour 6 points, l'excuse pour 4,5 points, un roi pour 6, une dame au moins seconde pour 6,une dame séche pour 0, un cavalier au moins 3éme pour 3... Si le résultat de cette ré-évaluation donne une différence entre ses points et le contrat à faire de moins de 4 points alors une garde sans chien peut-être tentée. si cette différence est négative alors une garde contre peut-être tentée.

    Il est évident que l'évaluation du jeu donnée ci-dessus ne peut être appliquée à la lettre. Ayant joué des milliers de parties, je suis capable de décider du contrat à prendre en quelques secondes. Ce que j'ai essayé de vous donner ce sont les éléments importants dans l'évaluation de son jeu et leurs impacts. Lorsque je ramasse les cartes de la donne, je range le jeu. Une fois le jeu rangé, je connais le nombre d'atouts, de bouts, la longue, y-a-t-il une roi, une dame dans cette longue, ai-je des rois, ai-je de quoi me faire 2 chicanes avec l'écart, puis-je tenir les atouts, ai-je l'entame pour jouer la longue, puis-je espérer des choses au chien. Je sais alors si je passe, petite ou garde. Pour les gardes sans et contre alors je reprends couleur par couleur, carte par carte et je vois ce que je peux faire et ne pas faire point par point.

    L'évaluation ci-dessus doit de plus être pondérée par 2 autres facteurs importants:

  • est-ce que quelqu'un d'autre a déjà parlé avant moi et demandé une petite. Dans ce cas le jeu doit être au moins un jeu de garde avec si possible une différence de moins de 5 points avec le contrat.
  • est-ce que ma stratégie est de prendre le petit. La chasse du petit par le preneur est extrêment difficile et échoue très souvent. Prendre en supposant que le petit sera pris est donc extrêment risqué.

    Le tableau suivant illustre l'évaluation des jeux dont les joueries ont été commentées sur ce site. La main de la jouerie "Tenue" nécessitait une ré-évaluation pour voir ce qui aurait pu être fait sans écart. Plus grand chose...

    Exemples:

    L'écart

    L'écart est très important car il permet de varier son jeu et permet de définir sa stratégie.

    Varier son jeu:
    Quand on joue toute une partie, ou souvent avec les mêmes joueurs, il est important de varier son jeu de maniére à ce que la défense ne puisse pas anticiper la maniére de jouer du preneur. L'écart aide à introduire des variantes telles que:

  • parfois on gardera un singleton vers le 10 et parfois on gardera un singleton vers le 2.
  • parfois on entamera son singleton et parfois on laissera la défense jouer la couleur du singleton.
  • parfois on coupera une couleur de l'excuse et parfois on laissera filer le pli en posant l'excuse.
  • parfois on écartera les honneurs du chien et parfois on les gardera.
  • ...

    Définir sa stratégie:
    D'abord on n'oubliera pas que le chien a aussi été vu par la défense et qu'il peut donc entraîner certains comportements:
    - par exemple, une dame au chien pourra être attendue par un défenseur,
    - si le 20 est au chien, il sera inutile d'essayer de faire croire à la défense que le 20 est chez elle pour provoquer une défausse,
    - si un roi est au chien, cette couleur ne sera pas ouverte par l'ouvreur (c'est à dire par le défenseur jouant avant le preneur),
    - si une couleur est quatrième au chien sans honneur, la défense risque de jouer atout pour pouvoir défausser,
    - si le chien contenait 3 atouts ou 19,20 alors la défense risque de ne pas jouer atout et peut tenter de cacher son petit,
    - si le chien ne contenait pas d'atout alors la défense risque de chasser.

    En régle général, si on ne chasse pas le petit et qu'on dispose d'un bon nombre d'atouts (7 ou plus), se faire des chicanes est très lucratif car on va tenter d'empocher les points de la défense. On essaiera donc de se faire des chicanes là ou l'on n'a pas les points. Si on doit garder des doubletons ou des singletons on essaiera de garder les couleurs dans lesquelles on a mis les points au chien. Avec beaucoup d'atouts, il est probable qu'on va pouvoir mener la partie de bout en bout et qu'il sera possible de terminer avec les honneurs d'une belle longue. On pourra donc garder un valet de sa longue.

    Si on est plus faible à l'atout alors se faire des chicanes peut être désastreux. Par exemple, si on a une belle longue qui permettrait de se faire 2 chicanes, il est illusoire de penser qu'on va pouvoir passer cette longue. Les honneurs intermédiaires de la longue devront être mis au chien. A d'autres couleurs il est possible de garder la paire Roi/dame si sa couleur est au plus de 4 cartes. Il est illusoire de garder roi/cavalier sur une couleur à 5 cartes. On évitera de tenter des impasses avec l'excuse (exemple dame sèche ou roi/cavalier secs) car l'excuse sera surement plus utile en temps qu'atout qu'en tant que couleur. Si on a le petit alors une chicane est obligatoire, si possible là ou la défense s'y attend le moins, comme par exemple la forte couleur du chien.

    Si on essaie de chasser le petit alors il ne faudra garder une longue que si on a les roi/dame permettant la reprise en main. Si on n'a pas le couple roi/dame et qu'on n'a pas les gros atouts alors la longue devra être mise au chien dans sa grande partie et on tentera de n'en garder que 2. On essaiera de ne pas avoir de couleur plus que 3ème. La décision de se faire un jeu de chasse a de forts impacts sur ce qui pourrait être fait à la couleur. Il est donc important de bien évaluer le gain que pourrait apporter le petit. Par exemple, si on a aucun bout ou 2 bouts en main, le petit pris rapporte 10 points. Il faut se demander si le coût de la chasse ne sera pas supérieur. Très souvent, le risque de chute est grand lorsqu'un preneur tente de chasser le petit. Autant ça ne coûte pas grand chose et c'est facile à la défense d'essayer de chasser, autant ça peut coûter très cher au preneur et c'est beaucoup plus difficile de le prendre car 2 défenseurs vont tout faire pour le sauver.

    L'entame par le preneur

    La premiére entame par le preneur est extrêmement importante. En général, de façon classique et basique le preneur attaque dans sa longue, va tenter de faire couper, et garde ses autres rois pour des reprises de main afin de rejouer dans sa longue.

    Mais, au moment de l'entame c'est le seul moment ou les défenseurs ne savent pas ou est le petit. Ils ne savent pas si il est chez le preneur ou bien chez eux. Cette incertitude peut-être utilisée par la preneur pour, par exemple, jouer petit atout pour provoquer la chute d'un gros atout par un défenseur qui voudrait jouer (mal) une protection. Une autre entame consisterait à partir d'un atout intermédiaire pour laisser croire à la défense qu'elle a le petit sans lui permettre de le localiser. Ainsi, le preneur peut partir du 14 pour semer la zizanie dans la défense. En partant du 14, la défense risque de ne pas identifier au 1er tour ou se trouve réellement le petit. La défense en main ne va donc pas à priori pas rejouer et pourrait partir couleur. Par la suite il est possible de continuer à jouer un moins gros atout pour laisser à penser que c'est le défenseur immédiatement à droite du preneur qui aurait le petit et toujours forcer la défense à jouer couleur.

    L'entame, c'est aussi un moment ou la défense ne sait pas quelle est la longue du preneur. Ca peut donc être l'occasion de lancer de temps en temps un singleton.

    Le but de la défense est de faire chuter le preneur. Pour cela la défense va essayer de faire un maximum de points et parfois chassera le petit. Pour faire ses points, la défense va essayer de se mettre en position de défausser. Chacun des défenseurs attendra une couleur détenue par le preneur et défaussera les autres. Une défense intelligente regarde les défausses des autres joueurs et évite de faire les mêmes. Lorsque le preneur jouera des plis non maîtres à ses couleurs, alors les défenseurs défausseront avec joie leurs points. De même, si les atouts ne sont pas uniformément répartis ou n'ont pas été faits tomber de façon uniforme, les défenseurs n'ayant plus d'atout défausseront encore sur ceux qui en ont.

    Jouer avec beaucoup d'atouts


    Avec une longue et au moins 8 atouts un preneur peut-être tenté de jouer sa longue en descendant, faire couper, jouer sa deuxième couleur, sécher les derniers atouts et terminer à l'atout. C'est une approche assez basique qui est probablement le meilleur moyen de laisser échapper tous les honneurs que la défense possède. Une meilleure alternative serait surement de ne commencer par jouer que des cartes non maîtresses dans sa longue. Faire couper modéremment jusqu'à ce que les cartes restantes de la longue deviennent maîtresses. Faire de même sur la deuxième couleur. Faire de même sur les atouts. Partir des petits atouts tant que tout le monde fournit afin de ne renverser le jeu que sur la fin et finir avec que des cartes maîtresses. Ce faisant la défense n'a jamais pu défausser ses points. Evidemment la défense ne reste pas inactive pendant que le preneur pratique cette jouerie. Elle nécessite donc un grand nombre d'atouts.

    Jouer avec peu d'atouts

    Quand le preneur a le petit court, il faut faire couper le chasseur potentiel de la défense. Ce chasseur est facilement identifiable car c'est lui qui part atout impair. Dans ce cas, l'entame du preneur se fera au roi de sa longue. Si par malchance le roi ou la carte suivante de cette couleur était coupé par un défenseur autre que le chasseur, alors le preneur aurait surement interêt à immédiatement arrêter cette longue pour passer à une autre couleur. En effet, si un défenseur est très court dans la longue du preneur, alors il est probable que le chasseur lui est long. Il faut donc trouver l'autre couleur dans laquelle le chasseur couperait.

    Avec peu d'atouts en main et sans le petit, le preneur a peut-être interêt à faire en sorte que la défense ne sauve pas son petit tout de suite afin de bloquer la jouerie atout le plus longtemps possible. Dans ce cas, le preneur peut entamer dans sa courte. Cela permet au preneur de bloquer cette couleur et d'éviter à la défense d'en rejouer, car la défense essaie de ne pas revenir dans l'entame du preneur. Voyant qu'il n'est pas prêt de couper ce qu'il peut croire être la longue du preneur, le défenseur qui aurait le petit court et de gros atouts peut être tenté d'indiquer sa courte à ses partenaires afin de couper à cette couleur. Ce faisant, il joue la longue du preneur jusqu'à ce qu'il n'en ait plus. Le preneur peut donc savoir combien il en reste chez les 2 autres défenseurs et peut décider de continuer ou non à essayer de gagner du temps.

    La poignée, la montrer ou pas ?

    Avec une poignée en main, le preneur peut se demander légitimement si il est intéressant de la montrer. La poignée ne rapporte que peu de points au preneur (uniquement lorsqu'il fait) mais montre la moitié du jeu du preneur. Elle donne donc beaucoup de renseignements à la défense. En particulier, elle montre à la défense ou serait le petit, qu'elles sont les gros atouts manquants et quel serait le nombre de cartes restantes à la couleur. Montrer une poignée a donc un coût, un coût qui peut être perdu en cas de chute. On évitera de montrer une poignée si on chasse le petit ou si l'on veut faire en sorte que la défense joue atout. On montrera une poignée si on veut faire en sorte que la défense joue couleur.

    Chasser ou ne pas chasser

    La chasse du petit par l'attaquant est extrêmement difficile et nécessite d'avoir un jeu qui s'y prête avec:
    - les reprises de main dans sa longue
    - beaucoup d'atouts
    La chasse nécessite aussi d'avoir de la chance dans la répartition et le positionnement des gros atouts et du petit.
    En général, un défenseur qui dispose de beaucoup d'atouts ne dispose pas de belles longues et n'a que des courtes. Inversement un défenseur qui a peu d'atouts dispose de belles longues et pas de belles courtes. Le preneur, lorsqu'il chasse le petit peut espérer une répartition telle que le possesseur du petit ait peu d'atouts et donc pas de belles courtes. Il peut aussi espérer que les atouts étant chez les autres défenseurs ceux-ci ne disposeront pas de belles longues. En jouant ainsi sur la répatition, avec de la chance, le petit n'est peut-être pas sauvable à la couleur par la défense. Ce petit n'est peut-être que sauvable à l'atout.
    Si le preneur n'a pas les gros atouts, ni les reprises de main à la couleur, alors la chasse devra commencer par un atout intermédiaire dont le but serait de faire tomber les gros atouts manquants (et en particulier le 21 si celui-ci manque).
    Si le preneur n'a pas les gros atouts (sauf le 21) mais a les reprises de main, il pourrait commencer par sa longue en attendant de localiser le petit et de localiser la stratégie du détenteur du petit: est-ce que celui-ci essaie d'indiquer une autre courte, de faire couper le preneur, de sécher le preneur ! Dans ce cas, le preneur part du principe que sa longue a de fortes chances d'être coupée par un autre défenseur avant le détenteur du petit. Il tente alors de raccourcir à l'atout les autres défenseurs afin que leurs gros atouts tombent sous les siens.
    Si le petit est situé immédiatement à la droite du preneur (cas idéal) alors le preneur jouera petit atout plusieurs fois de suite afin de raccourcir les atouts de la défense. Si le preneur est amené à couper, il doit couper d'un atout intermédiaire afin de garder ses petits atouts pour les entamer. Par exemple si le preneur a à l'atout: 2,4,5,7, 11, 13, 16,18, 21 alors il réservera les 11 et 13 pour couper, les 2,4,5 pour les entamer et les gros 16,17,21 pour terminer.

    L'excuse

    L'excuse est une carte très intéressante pour le preneur car elle peut servir à remplacer soit un atout (pour éviter de se raccourcir), soit un gros atout, soit une couleur (pour faire par la suite des honneurs devenus trop courts).
    En général, le preneur essaiera dans la mesure du possible de mettre son excuse sur un pli qui est perdu. Il se débrouillera pour faire cela sur un pli sans que la défense n'en profite pour mettre des honneurs. Il peut aussi utiliser son excuse pour volontairement donner la main à la défense dans le cas ou par exemple il lui resterait en main une dame troisème dans une couleur.

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